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  Les news de bled

Par Bélaïd Abane (*)

Il est une constante de l’histoire de l’humanité : l’installation, par la violence, de peuples agressifs et prédateurs sur les territoires de populations vaincues. De telles intrusions au sein d’une population déjà établie, laquelle devant alors s’effacer au profit des nouveaux venus, relèveraient même d’une pulsion biologique inhérente à tous les êtres vivants. Nul ne songe, et certainement pas les conquérants eux-mêmes, à se poser la question de savoir s’il est légitime ou non de s’accaparer des terres appartenant à d’autres, surtout quand ces «autres» sont des indigènes, c'est-à-dire, une catégorie automatiquement frappée du sceau de l’infériorité.
L’histoire de l’espèce humaine foisonne également de massacres de masse et de génocides. Certes, les plus proches de nous choquent notre conscience en ce qu’ils furent commis en violation de principes humanistes universellement admis depuis la Renaissance européenne, les Lumières et la sacralisation des droits humains, née des révolutions anglaise (Bill of Rights, 1689) et française (Déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen, 1789). Comme la colonisation qui leur a donné naissance, les atrocités qu’ont fait subir des hommes à d’autres hommes, sont du domaine de l’histoire même si la mémoire en garde des cicatrices encore vives. Ce qui, en vérité, pèse plus lourdement dans la mémoire algérienne, c’est autre chose. C’est le fait — plus encore dans l’Afrique subsaharienne — que la colonisation se soit imposée comme un système de domination poussée jusqu’à la «réification» des autochtones. Alors que dans une Europe baignée des Lumières, l’intelligentsia saint simonienne prétendait s’engager dans «une association avec le vaincu, qui lui soit, en définitive, aussi avantageuse qu’au vainqueur », la domination coloniale s’était au contraire imposée comme «l’une des oppressions majeures de notre temps», selon la formule d’Albert Memmi. Telle était la spécificité du colonialisme, qui fait de «la présence française en Algérie», tout autre chose que ces banals mouvements migratoires si familiers de l’histoire humaine. Alors s’agit-il ici de faire le procès du colonialisme et de la colonisation ? Non bien évidemment, car c’est déjà fait. A l’inverse, il serait vain de rechercher dans le «viol à main armée» d’un peuple, dans sa soumission brutale par la force conjuguée des armes et des lois, de quelconques philanthropie et noblesse de dessein, comme le fait accroire encore la rhétorique de «l’intention civilisatrice». Même les exécuteurs des «hautes œuvres» coloniales, ces fanfarons de l’infâme, n’y voyaient eux-mêmes que «compression », «répression» et même parfois «extermination» dont ils tiraient souvent panache et gloire. Il ne s’agit pas non plus, pour les Algériens, de demander une quelconque réparation. Ce serait dérisoire. Car la saignée démographique, les souffrances incommensurables, l’abaissement et les humiliations subies, sont «irréparables», pour reprendre le mot d’Aimé Césaire. Que répondre alors aux promoteurs de la loi négationniste du 23 février 2005 à tous ceux qui assènent sans vergogne que la colonisation a joué un «rôle positif» en apportant aux colonisés le progrès et les «bienfaits» de la civilisation ? Que cela relève du cynisme de ce violeur qui légitime son crime en soutenant, sûr de sa suprématie machiste, que sa victime a pris du plaisir. Quand un enfant naît d’un crime horrible et inexpiable, on fait avec. Mais nul n’oserait avancer ou même imaginer que l’acte abominable qui lui a donné naissance, ait pu «jouer un rôle positif» ou qu’il ait été, d’une quelconque façon, pourvoyeur de «bienfaits ». Et que penser de cette comptabilité obscène qui consiste à faire un bilan de la colonisation comme si celle-ci était le passage obligé pour inonder les peuples dits «sauvages» des bienfaits et des progrès d’une civilisation décrétée une fois pour toutes comme norme supérieure et universelle ? A supposer que «les nations inférieures» n’aient pas eu les capacités de produire leurs propres progrès et que l’intention civilisatrice du colonisateur ait été sincère, n’y avait-il pas d’autres moyens que l’horreur dévastatrice d’une conquête militaire ? «Je me demande pourquoi mon pays doit être ébranlé dans tous ses fondements et frappé dans tous ses principes de vitalité… par une armée… qui ne cherche qu’à introduire la civilisation», écrivait en 1833, déjà, Hamdan Khodja, dernier secrétaire du gouvernement d’Alger. Entrons, cependant, dans ce raisonnement et poursuivons la logique «du rôle positif» jusqu’à ses retranchements. Comme les colonialistes d’hier, les «révisionnistes» d’aujourd’hui clament que ce ne fut pas si noir, que la colonisation a mis l’Algérie sur la voie de la modernité économique. L’Algérie, sans la colonisation, serait donc restée figée pendant plus d’un siècle dans sa situation de 1830 ! Soit. Rappelons que cette «modernisation» à la hussarde que lui impose la colonisation s’est faite au bénéfice des colons et au détriment d’une population autochtone massivement dépossédée de sa terre, sans cesse refoulée et abandonnée dans le dénuement le plus total, aux famines et aux épidémies. Les laudateurs de la colonisation rappellent également que celle-ci a créé une infrastructure, tracé des voies de communication (routes, chemins de fer…), érigé des barrages, bâti des hôpitaux. Certes. Mais rappelons aussi que cette «bonne colonisation» du pays était destinée à la population allogène même si par ricochet une poignée d’autochtones «évolués» y trouvait son compte. Quant à la masse algérienne qui en paya lourdement le prix, elle en était quasiment exclue. Ce progrès matériel qu’elle regardait passer comme un mirage ne faisait en réalité qu’exacerber davantage sa condition de colonisée. «Que m’importe, clamait Ferhat Abbas, avec humour, qu’on mette l’électricité dans la maison si cette maison n’est pas la mienne.» L’agriculture coloniale, on dira à juste titre qu’elle fut l’une des plus modernes du monde et que les domaines colons pouvaient rivaliser avec les meilleures exploitations californiennes. Orientée vers la satisfaction des besoins de la métropole, notamment la viticulture qui en était l’une des activités essentielles, dans un pays où 90% de la population ne consommaient pas de vin, l’exploitation coloniale désorganisa brutalement, par la violence militaire, le système agraire algérien, basé sur la propriété communautaire et solidaire. Elle produira dans son sillage une effroyable casse humaine. Au demeurant, l’Algérie n’était pas une terra nullus, ni ce marécage que prétendaient les chantres de «la colonisation bienfaitrice». Les silos du Directoire ne regorgeaient-ils pas de ce blé des Hauts-Plateaux, destiné aux armées du général Bonaparte ? C’était bien ce blé algérien livré à crédit, que la Restauration refusera de payer. Au grand dam du colérique dey Hussein dont le malencontreux coup d’éventail aura été, pour la petite histoire, l’incident déclencheur de l’aventure coloniale française en Algérie. Et l’école ? Oui naturellement, on a construit des écoles et il y eut même des hommes inspirés comme le recteur Jeanmaire, pour prêcher avec constance et persévérance «l’école pour les indigènes», malgré l’opposition résolue des colons. Mais il suffit de rappeler la proportion des enfants européens et celle des enfants indigènes qui fréquentaient ces écoles pour s’apercevoir que les portes de l’instruction républicaine largement ouvertes aux premiers, étaient quasiment fermées aux seconds (à peine 10% d’enfants algériens scolarisés en 1954). Résultat de cette politique : le taux d’analphabétisme en français est, au début des années 1950, estimé à 94% chez les hommes et 98% chez les femmes. Chiffres on ne peut plus révélateurs, sur le très faible degré de pénétration de la culture et de la civilisation françaises dans les foyers musulmans. Venons-en à cette «renaissance démographique» tant vantée, de la population algérienne, attribuée à la vaccination et aux bienfaits de la médecine coloniale. Rappelons d’abord que cette résurrection fait suite à l’hécatombe de la conquête aggravée au cours des années 1860, par les famines et les épidémies résultant du bouleversement de la société algérienne. Véritable catastrophe «écologique» organisée, qui frappa une population réduite en «poussière d’individus », la saignée démographique amputa la population indigène de son tiers, dans les estimations les plus optimistes. La croissance démographique durant les cinquante premières années du XXe siècle était-elle le résultat d’une politique sanitaire ? S’il existait un système de santé colonial, la masse indigène en était, en vérité, quasiment exclue comme elle l’était, du reste, de tous les progrès sociaux que prodiguait déjà l’Etat social libéral français à ses citoyens. Ainsi, la vaccination ne touchait que les enfants scolarisés, soit une infime proportion des enfants d’âge scolaire (près de 10% en 1954). Du reste, les ravages de la tuberculose et de la poliomyélite dans la population algérienne jusqu’en 1962, prouvent, s’il en était besoin, la faiblesse de la couverture vaccinale chez les enfants indigènes. Ces deux maladies infectieuses, comme beaucoup d’autres, ont sévi, notamment chez les enfants, comme de véritables fléaux jusqu’à l’indépendance. A la vérité, l’immense majorité de la population algérienne ne verra jamais passer l’ombre d’un progrès sanitaire durant la période coloniale. Et pour être tout à fait exact, elle ne le recherchait pas, faute de moyens, mais aussi parce qu’elle se méfiait de tout ce qui venait du colonisateur. Quant à sa survie et à son exubérance démographique, elles relèvent d’un véritable phénomène d’adaptation et de sélection naturelle. Décimée par une mortalité dévastatrice, la population algérienne ne trouvait son salut que dans la transmission intensive des gènes : faire beaucoup d’enfants dans l’espoir d’en soustraire quelques-uns à la fatalité infantile. Plutôt que de progrès sanitaires, c’est, d’une certaine manière, de résistance démographique qu’il s’est agi. Même si on lui accorde le bénéfice du doute, peut-on passer sur les contradictions patentes d’un système qui prétendait vouloir déverser ses «bienfaits » sur une population, tout en la maintenant sous sa domination ? Le progrès n’est-il pas, au contraire, par essence libérateur ? Et aux yeux des colonisés eux-mêmes, censés en être les bénéficiaires, la démarche n’étaitelle pas suspecte, même à travers la blouse blanche du docteur ou le tablier gris de l’instituteur, tant il leur était difficile de «découvrir un progrès où le bien n’ait point cheminé en compagnie du mal» ? Cette «civilisation» qu’on prétendait leur dispenser avec générosité, n’avait-elle pas pour fonction de faire oublier les violences de la conquête et de l’occupation, voire de les légitimer ? Notamment pour tous ceux — saint-simoniens, républicains et autres humanistes embarqués dans l’aventure coloniale — dont la conscience fut troublée par les horreurs parfois gratuites infligées à une population sans défense. En agitant «l’école» et «la vaccination», n’était-ce pas une façon de se fabriquer à bon compte, une bonne conscience et d’avoir l’illusion d’un honnête dédommagement ? Pour les générations d’Algériens qui l’ont vécue, s’il était question de faire un bilan, la colonisation, entreprise de crimes et de rapines, est une immense tache noire, un calvaire, une horrible mutilation subie à froid. Elle a non seulement donné un coup d’arrêt brutal à l’évolution historique de la société algérienne, mais l’a même obligée à emprunter le sens inverse. Et si on y ajoute la brutalisation permanente, la colonisation a été plus qu’une régression, un processus de décivilisation et d’ensauvagement qui n’en finit pas de libérer ses miasmes toxiques. Si bénéfice il y a, c’est dans l’essence fondamentalement négative du colonialisme qu’il faut le chercher. Il est en effet encore heureux que la société algérienne n’ait pas subi l’épreuve coloniale en pure perte. Et qu’il y ait eu, après le choc de la conquête et l’éclatement de la société algérienne, et face à l’adversité coloniale, comme un coup d’accélérateur au processus de formation d’un Etat-nation moderne dont la société algérienne portait, du reste, déjà, les bases et les prémices. Là, est, peut-être alors, le «bébé» de «l’outrage» colonial. Faudrait-il pour autant s’en féliciter ou remercier «le violeur» ? Quant aux routes, ponts, barrages… — cette citadelle de la colonisation érigée avec le sang et la sueur des autochtones — ce ne sont, pour reprendre la célèbre formule de Kateb Yacine, que butins de guerre. Comme le furent jadis, pour l’Armée d’Afrique et la Monarchie de Juillet, les trésors de la Régence, les villes et les plaines algériennes, les silos des Hauts-Plateaux constantinois, les patrimoines des nombreuses tribus exterminées au cours des razzias… Il y eut cependant, au cœur même du système colonial et durant la guerre 1954-1962, il faut le reconnaître et le dire haut et fort, des hommes et des femmes, fonctionnaires, politiques, scientifiques, journalistes, médecins, artistes, instituteurs, militaires…, qui ont osé braver le credo colonialiste pour montrer l’autre visage, le vrai visage de la France. Celui des Lumières et de cette Révolution qui clama à la face du monde que «tous les hommes naissent libres et égaux». Cette France qui reconnaîtra sa responsabilité envers les juifs livrés aux Nazis, celle qui refusera de faire une guerre illégale à l’Irak, cette France-là, c’est avec elle que les Algériens voudraient définitivement tourner la page en regardant haut pour construire l’avenir. Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est en effet de tourner une bonne fois pour toutes, réellement, cette page sinistre de l’histoire franco-algérienne. Mais à quelles conditions ? Pour les Algériens, il ne s’agit pas de «visser le couvercle sur le puits» ni de faire table rase du passé. On ne peut en effet demander à un peuple d’effacer ou d’oublier les pages les plus tragiques de son histoire pour sacrifier au réalisme économique et politique. Les leçons du passé sont utiles et toujours bonnes à prendre, enseignait Edmund Burke, ce politicien irlandais, philosophe de son état. Sinon sur quoi reposerait l’histoire des Algériens et quel serait le ciment de leur mémoire, celle qui leur permettra de conjurer les malheurs du futur et d’échapper aux répétitions funestes de l’histoire ? D’un autre côté pour être crédibles, les Algériens ne pourront échapper ad vitam æternam à leur propre travail de mémoire. Ils ne peuvent pas exiger de la France coloniale qu’elle fasse son mea-culpa, tout en laissant fermement vissé le couvercle sur le puits de leurs propres excès, dérives et autres vilenies. Pour les Français, le passé colonial de leur pays, la guerre de dévastation méthodique implacable durant la phase d’occupation coloniale, livrée aux Algériens — contre la population elle-même avait rappelé en son temps Alexis de Tocqueville — la guerre de reconquête coloniale avec son lot de tortures, de châtiments collectifs, d’exécutions sommaires, de regroupement-déracinement de la population… tout cela c’est du passé. Comme la guerre des Gaules, les Arabes à Poitiers.... Les révélations récurrentes de ces dernières années sur la torture, les exécutions sommaires collectives, l’utilisation du napalm — bidons spéciaux, disait-on —…, faites par des témoins crédibles ou par les acteurs de premier plan eux-mêmes, comme les généraux Massu et Aussaresses, ont été chaque fois accueillies dans l’opinion avec un mélange d’étonnement, d’incrédulité, de pudeur et d’agacement. «Il faut oublier, arrêtons de ressasser, tout ça c’est du passé», répète-t-on à l’envi. Point de débat donc. Ni sur la torture, ni sur la colonisation et les guerres ayant opposé les Algériens à la France coloniale. Pourquoi ce black-out ? Est-ce du fait que le passé colonial révèle de la République française si officiellement vertueuse, une facette inavouable ? Pas aussi irréprochable en effet cette République qui autorise et cautionne hors de la communauté nationale française, des pratiques en totale inadéquation avec les principes et les idéaux qu’elle était censée, au contraire, défendre et prodiguer. Inacceptable contradiction qui explique, sans doute, ce climat de dénégation collective et l’attitude d’évitement des Français, s’agissant de l’aventure coloniale algérienne de leur pays. Mais cela n’explique pas tout. Il y a aussi, et c’est sans doute la raison la plus importante, que les Français ne savent rien de ce qui s’est vraiment passé durant la conquête et l’occupation coloniale de l’Algérie, ni sur l’épouvantable tuerie de Sétif, ni sur les méthodes de «la pacification» et de la répression qui s’est abattue sur les Algériens durant leur guerre de Libération nationale et tout particulièrement au cours de cette année 1957 qui en fut le paroxysme. L’explication de cette ignorance est qu’on leur a, toujours, tout caché. Au reste, pour les Français de 2012, regarder en arrière et remuer l’histoire, la démarche est plus que jamais improbable dans la conjoncture actuelle de déculpabilisation généralisée du Nord vis-à-vis du Sud. Une conjoncture où le «sanglot de l’homme blanc» n’est plus qu’un lointain souvenir, si tant est que «l’homme blanc» ait été, un jour, réellement pris de sanglots ou sincèrement tourmenté par le remords de la prédation coloniale. Pour le réalisme, il ne s’agit pas de culpabiliser les Français vis-à-vis de faits répréhensibles dont ils ne sont pas responsables. Ni même de désigner les tortionnaires. La liste serait longue et l’on serait aussi embarrassé de choisir à qui, du pouvoir civil ou de la hiérarchie militaire de l’époque, irait mieux le chapeau. Du reste, les crimes de guerre de Jacques, Paul ou Marcel et ceux de bien d’autres tortionnaires patentés, sont depuis longtemps passés à la trappe de l’amnistie. Aussi, une loi sur la criminalisation du colonialisme et toutes les procédures judiciaires qu’elle implique devant des tribunaux algériens, n’a absolument aucun sens si ce n’est là aussi de faire mousser un orgueil national mal placé, de renflouer toutes les surenchères patriotardes et politiciennes et surtout d’empoisonner à jamais les relations franco-algériennes. S’agissant de la moitié droitière de la classe politique française, prisonnière de considérations électoralistes, elle passe son temps à caresser dans le sens du poil de larges secteurs de l’opinion, nostalgiques de l’empire colonial français. La droite décomplexée, en phase ou en cheville avec des groupes de pressions électoraux, est même dans la surenchère nationaliste, en perpétuelle glorification du passé colonial français, valorisant la colonisation comme une entreprise de civilisation et de bienfaits au profit de peuples considérés comme inférieurs. Il n’y a rien à en attendre. Elle n’est pas près de verser une goutte de lubrifiant, une seule, dans les rouages des relations franco-algériennes. Et l’Etat français qu’incarne aujourd’hui François Hollande, deuxième chef d’Etat français socialiste à fouler le sol de l’Algérie indépendante en cette fin d’année 2012 ? Il ne s’agit pas pour le président de la République française de se livrer à un quelconque exercice d’auto-flagellation. Ni de faire un acte de contrition que personne au demeurant ne réclame, mais le geste symbolique de reconnaître les torts faits à un peuple algérien impatient d’ouvrir une nouvelle page dans ses relations avec cette France à la fois si proche et si lointaine, une France certes encore détestée, mais en même temps adulée et admirée. Ce n’est pas trop demander à François Hollande qui incarne aujourd’hui la nation et l’Etat français. Car c’est bien un gouvernement français investi régulièrement de la confiance du peuple français, incarnant la pérennité de l’Etat français, nanti de «pouvoirs spéciaux » votés par la majorité de la représentation nationale française, qui ordonne à l’armée de livrer une guerre totale à une population miséreuse et sans défense. Une guerre où la torture, les exécutions sommaires collectives et les disparitions sont érigées en pratiques banalisées. Une guerre où les sévices, poussés à leur niveau extrême de cruauté, d’avilissement et de déshumanisation, sont infligés à des milliers d’Algériens traités comme des choses. Et cela, en vertu de ce principe — la responsabilité collective — que l’occupant allemand invoquait pour tailler dans la chair du peuple français, des «Ouradour», des «Tulle» et autres «Châteaubriant». C’est également au nom de l’Etat et du peuple français que furent commis durant la conquête et tout au long du passé colonial, les massacres de tribus entières, et les pires exactions ayant coûté la vie à des centaines de milliers d’Algériens innocents. Stephen Harper, Premier ministre du Canada, avait présenté il y a quelques mois ses excuses aux «peuples premiers» pour les avoir dénaturés, déculturés en «tuant l’Indien dans l’enfant». Même l’Italie berlusconienne a fini par faire amende honorable en reconnaissant le mal fait aux Libyens. Pourquoi pas un geste en direction du peuple algérien, au nom de l’Etat français ? François Hollande qui a reconnu le massacre du 17 Octobre 1961 ne peut ignorer les centaines d’autres 17 Octobre qui ont ensanglanté l’histoire de l’Algérie durant 130 ans de colonisation et tout particulièrement durant ce XIXe siècle de compression de la population algérienne et de dévastation méthodique de son cadre de vie. S’il venait à faire ce geste, François Hollande se grandirait, grandirait son pays, marquerait l’histoire de France du sceau de l’honneur et de la fidélité aux valeurs des Lumières et aux nobles principes de 1789. Au demeurant, tout le monde y gagnerait. Ce geste de reconnaissance claire et sans détour des souffrances infligées au peuple algérien du fait de la colonisation et de la guerre de reconquête coloniale, serait en effet le prélude à une réelle refondation des relations franco-algériennes. Ce serait également le début d’une véritable réconciliation et d’une ère nouvelle où les communautés harki, juive et pied-noir, victimes malgré elles de l’histoire, trouveront enfin leur compte. Bien mieux, en tout cas, que dans l’atmosphère actuelle de compétition antagonique et victimaire. Ce geste aiderait enfin, sans aucun doute, à atténuer dans le regard des Français, la méfiance encore chargée de ces représentations coloniales qui renvoient «les minorités visibles» à leur histoire et posent encore à la société française l’épineux casse-tête de l’intégration. Cette reconnaissance des facettes sombres de son passé, ce pas en direction des peuples qu’elle a jadis subjugués, ne signifierait pour la France ni humiliation, ni rabaissement, loin s’en faut. Au contraire, elle en sortirait grandie. Elle conférerait encore plus de crédit à ses institutions, sa démocratie, sa vie politique et sa diplomatie. Son aura et son prestige international n’en seraient que plus grands. B. A.
* Professeur de médecine, politologue, auteur de l’Algérie en guerre Abane Ramdane et les fusils de la rébellion, L’Harmattan 2008.

 
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